Il faut voir plus clair avant de donner carte blanche à la Chine
OTTAWA – La chef du Parti vert du Canada et députée de Saanich—Gulf Islands Elizabeth May demandera la parole aujourd’hui à la Chambre des communes immédiatement après la conclusion des affaires courantes pour réclamer la tenue d’un débat d’urgence sur l’Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers (APIE) Canada-Chine. Mme May a fait part de son intention au président de la Chambre Andrew Scheer vendredi.
Dans sa notification transmise à M. Scheer, Mme May fait valoir que cet « accord lourd de conséquences pour la souveraineté, la sécurité et la démocratie du Canada », signé par Stephen Harper le 9 septembre, mais caché aux Canadiennes et aux Canadiens ainsi qu’au Parlement jusqu’à son dépôt discret mercredi dernier, justifie amplement la tenue d’un débat pour tenter d’y voir plus clair.
Conformément à la Politique sur le dépôt des traités devant le Parlement, l’APIE aurait dû être déposé devant la Chambre des communes pendant au moins vingt et un jours de séance avant sa ratification, période à l’issue de laquelle le Conseil privé pourrait, sans examen public ni débat parlementaire préalable, lui donner force de loi.
« Dans ma notification au président de la Chambre, j’ai mentionné qu’il s’agissait sans doute du traité commercial le plus important depuis l’ALENA », a dit Mme May, « et le fait qu’il ait pu être négocié et ratifié ainsi à huis clos est profondément corrosif pour la démocratie canadienne.
« Je réalise cependant que dans les circonstances, un débat d’urgence est nettement insuffisant, mais il pourrait fournir la seule occasion aux parlementaires d’examiner l’APIE et d’en débattre avant qu’il n’engage notre pays pour les quinze prochaines années, surtout si le NPD et les libéraux choisissent un autre thème de débat pour les jours de l’opposition. »
Parmi les éléments les plus préoccupants qui doivent être immédiatement portés à l’attention du public, notons ceux-ci :
Article 3 Promotion et admission des investissements – cet article stipule que chaque partie contractante doit favoriser sur son territoire les investissements réalisés par l’autre partie et admettre ces investissements conformément à sa législation. Il pourrait contraindre le Canada à approuver des investissements chinois qui menacent notre sécurité nationale ou desquels le Canada retirerait un avantage très marginal voire un « avantage net » négatif, un concept qui n’a pas encore été défini.
Accès aux mécanismes d’arbitrage investisseur-État et de règlement des différends – comme pour le chapitre 11 de l’ALENA, les sociétés d’État chinoises ont le droit d’intenter des poursuites contre le gouvernement du Canada lorsqu’une loi, un règlement ou une décision judiciaire risque de porter préjudice à leurs activités ou réduire leur marge de profit. Contrairement à l’ALENA, ce recours peut avoir lieu à huis clos, par le biais d’un tribunal spécial. La Chine profitait récemment de ce même mécanisme d’arbitrage pour réclamer près de 3 milliards d’euros à la Belgique.
Accès limité aux tribunaux – seul le gouvernement fédéral pourra prendre part aux audiences secrètes d’un tribunal spécial. En effet, même si leurs intérêts sont directement touchés, les gouvernements provinciaux, les sociétés canadiennes et d’autres intervenants n’auront pas le droit de comparaître et d’être entendus par un tribunal spécial.
Normes de rendement – la Chine peut imposer ses conditions aux investisseurs étrangers en les obligeant notamment à recourir à des fournisseurs locaux, à travailler avec des partenaires d’affaires locaux ou encore à former des travailleurs et des gestionnaires locaux, et ce, sans aucune réciprocité pour le Canada.
Dispositions sur le traitement national – ces dispositions empêchent les administrations fédérales, provinciales et municipales de fixer des conditions favorables pour les travailleurs ou les intrants canadiens pour les projets en sol canadien.
Article 33(2)c) – cet article oblige le Canada à limiter l’accès national à nos propres réserves de combustibles fossiles et d’uranium ainsi qu’à toutes nos ressources forestières et halieutiques et à toute autre ressource épuisable dans une mesure qui correspond aux limites imposées aux exportations vers la Chine.
« Compte tenu de la prise de contrôle imminente de Nexen par la Chinese National Offshore Oil Company (CNOOC) et du nouvel afflux d’investissements de sociétés d’État chinoises qui suivra, c’est avec stupéfaction que je constate que Stephen Harper est prêt à placer le Canada dans une position aussi précaire avec l’APIE », a déploré Mme May. « Je sais que je ne suis pas la seule canadienne à penser que le premier ministre a entrepris de liquider notre pays. Nous devons absolument examiner l’APIE avant qu’il ne soit trop tard. »
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Renseignements :
Stéphane Vigneault
Coordonnateur des communications
Parti vert du Canada
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