Déclaration du chef intérimaire du Parti vert du Canada Amita Kuttner à l'occasion de la Journée internationale de la visibilité transgenre.
OTTAWA – C'est un honneur au-delà de toute attente d'être le premier chef ouvertement trans et non-binaire d'un parti politique fédéral au Canada. Je me dois de bien représenter le mouvement LGBTQ2+ durant mon mandat à titre de chef intérimaire.
J'ai une vue d'ensemble des nombreux obstacles à la participation à la politique auxquels sont confrontées les personnes trans et non binaires, mais je suis aussi très conscient qu'il s'agit d'une expérience personnelle et qu'elle est limitée par mes privilèges. Je ne suis pas confrontée à la transmisogynie que subissent les femmes trans et de nombreuses personnes non binaires. Je suis certainement encore confronté à beaucoup de misogynie, qui équivaut à la transphobie dans la mesure où je la subis uniquement parce que je ne suis pas correctement considéré comme un homme. Mais je préfère profiter de cette occasion pour changer le système plutôt que de chercher à être traité comme un homme dans une société inéquitable.
J'ai également pu constater les avantages de la représentation, en ce sens que la présence d'une personne trans à un poste de direction est transformatrice. Ma participation contribue à changer la conversation. Il est vraiment difficile d'ignorer l'existence des gens quand ils sont juste en face de vous. Il est certain qu'en étant ici, j'apporte un regard différent sur toutes les politiques, mais il est important de préciser que ce sont mes expériences vécues, et non mon identité seule, qui rendent cela vrai.
D'une certaine manière, je pense que le fait d'être visible publiquement ne fait qu'aggraver la situation, car elle est constante et les gens ont l'impression d'avoir la permission d'attaquer les personnes au pouvoir. D'un autre côté, je suis protégé par le fait que j'occupe une position que beaucoup respectent et que j'ai une communauté forte pour me défendre. J'ai toujours à l'esprit les membres de la communauté trans et non-binaire qui sont excessivement vulnérables, en particulier en raison de l'intersection de l’origine ethnique, de la pauvreté et d'autres facteurs.
Je ne peux pas laisser passer cette période sans faire pression pour ce que je sais être des changements politiques substantiels cruellement nécessaires. Bien qu'on puisse m'accuser de me concentrer trop sur mon identité, ce n'est pas une raison pour ne pas faire pression pour ce qui est juste. La haine et la violence à l'encontre des personnes transgenres sont en augmentation et les législations discriminatoires terrifiantes sont de plus en plus courantes, comme nous le voyons quotidiennement aux États-Unis. Cela signifie que la vie des enfants est de plus en plus en danger.
Ce qui est clair pour moi, c'est que la haine anti-trans n'est pas bien reconnue. Les préjugés systémiques et de nombreuses formes de discrimination passent encore inaperçus et sont souvent contestés par ceux qui ne sont pas touchés. Les sentiments anti-trans semblent être particulièrement contestés, je vois constamment des messages ouvertement haineux défendus par des personnes bien intentionnées qui ne connaissent tout simplement pas le contexte et l'histoire.
C'est vraiment une expérience terrible que de voir son être et son identité si fortement politisés. J'ai été horrifié lorsque des personnes ont suggéré que mon identité était destinée à attirer l'attention pour obtenir du pouvoir, alors qu'en fait, elle est écrasante à porter. Une identité politisée signifie que les gens se sentent libres de discuter de votre existence même sans se soucier de votre bien-être.
Cela doit cesser, nous devons reconnaître que la haine anti-trans est bien réelle et aussi inacceptable que toute autre forme de haine. Ceux qui la perpétuent doivent en être informés et avoir la possibilité (assez rapidement) d'arrêter. Nous en avons assez de devoir expliquer encore et encore pourquoi les questions personnelles indiscrètes et les remarques haineuses ne sont pas acceptables.
L'identité et l'expression sexuelles sont maintenant protégées contre la discrimination par la Loi canadienne sur les droits de la personne, mais comme nous le savons malheureusement bien, les gens ont peu de recours lorsqu'ils sont victimes de discrimination, quelle qu'elle soit. Comme dans le cas de notre Charte canadienne des droits et libertés, les documents disent de bonnes choses, mais l'application est laissée à l'individu qui doit passer par le système judiciaire.
Fondamentalement, les structures sociétales et gouvernementales fondées sur le patriarcat et la suprématie blanche continueront à permettre la discrimination fondée sur le sexe jusqu'à ce qu'elles soient transformées. Par défaut, c'est également à l'individu concerné qu'il incombe de chercher un recours, ce qui constitue en soi une structure discriminatoire qui exige que les personnes marginalisées disposent du temps et des ressources nécessaires pour se battre afin que leurs droits fondamentaux soient respectés.
Aujourd'hui, alors que nous sommes visibles, que nous pleurons constamment les personnes parmi nous qui ont été victimes de la violence et de la haine, ainsi que de l'oppression systémique, j'espère que nous pourrons également partager notre joie. En étant visibles, pour les personnes parmi nous qui peuvent l'être, nous contribuons à ouvrir la voie à d'autres, à aider les gens à apprendre à nous connaître et à combattre la haine.
Quelques besoins politiques importants :
- Un financement stable pour les organisations trans
Le financement des organisations 2SLGBTQIA+ est souvent peu fiable, ce qui ajoute à la précarité de la vie de nombreuses personnes trans. - Une stratégie pour mettre fin à la pratique de la thérapie de conversion et soutenir les personnes survivantes
Même si la pratique est interdite, sans un plan pour y mettre fin et soutenir les personnes survivantes, le mal continue. - Un meilleur accès aux soins de santé, y compris un accès universel aux soins de santé mentale
Nous avons besoin d'un meilleur accès aux soins d'affirmation du genre à travers le pays, car ils varient selon les régions. Nous avons également besoin d'un accès sûr à des soins généraux adaptés aux personnes trans, car actuellement, les soins de santé ordinaires sont souvent inaccessibles, discriminatoires ou peu informés. - Une stratégie de lutte contre la haine envers les personnes trans
Une reconnaissance directe de la haine envers les personnes trans et un plan pour la combattre par l'éducation et la protection. - Amélioration des lois et des processus relatifs à l'immigration et aux personnes réfugiées
Les droits des personnes trans à l'extérieur du Canada sont variables et nous devons aider les gens à se mettre en sécurité. Se débarrasser de l'entente sur les tiers pays sûrs avec la montée de la législation anti trans aux États-Unis en est un exemple. - Corriger les lois sur la citoyenneté
Les personnes qui ont des liens avec le Canada et qui revendiquent la citoyenneté sont perdues et exclues car elles ne peuvent pas venir au Canada par les voies normales d'immigration et de réfugiés. Les enfants trans sont également mis en danger de cette façon. - Surveillance gouvernementale de la sécurité du processus pour les personnes réfugiées trans et non-binaires
Le gouvernement fédéral devrait travailler avec les provinces pour s'assurer que l'émission de cartes d'identité gouvernementales soit accessible et se fasse avec les noms des personnes et les marqueurs de genre appropriés. Dans le cas contraire, cela représente un énorme fardeau en termes de temps, de coûts et d'administration pour l'individu, ainsi qu'un fardeau psychologique.
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